Durant le mois de juin vous avez pu découvrir les articles du Challenge AZ. Avec Arlette nous avons participé au Blog des promos du DU Généalogie de Nîmes. Vous pouvez ainsi découvrir son texte « La révolte des aigles » qui a eu le 2e prix de la nouvelle des séniors de la ville de Nice.
Mais le respect de notre particularisme historique est souvent source de « boufaîsse » si l’on ’écoute les commentaires de journalistes ou de touristes qui font des amalgames : non Nice n’a jamais été italienne !
Pour éviter cela nous vous proposons de découvrir ou de redécouvrir l’histoire de notre Comté à travers la lettre …
» N comme Nice ou plus exactement « Countea Nissa », car plus qu’une ville Nice est un Comté avec son histoire et son particularisme archivistique.
Est-ce dû à sa situation géographique entre les berges du Var et les cimes du Mercantour? Ces terres ont toujours suscité de l’intérêt.
Après le traité de Verdun en 864, le Comté de Nice passe successivement entre les mains des Comtes d’Arles, de la maison de Barcelone, de la république de Gênes pour réintégrer la Provence en 1216. Le mariage de Charles 1er d’Anjou avec Béatrice de Provence, le 31 janvier 1246, va être à l’origine d’une suite d’événements qui vont en sceller le destin.
Charles II puis Robert 1er lui succèdent et en 1343 sa petite-fille la célèbre Reine Jeanne hérite à son tour de la Sicile, de Forcalquier, du Piémont et de la Provence. Malgré quatre unions, l’absence d’héritier va provoquer le début d’une guerre de succession entre Charles de Duras (son cousin) et Louis d’Anjou (fils du roi de France – Jean le Bon).
Le 28 septembre 1388 est la date du ralliement de la communauté moyennant un accord transitoire de trois ans, qui sera transformé en acte d’hommage définitif, en novembre 1391, faute de remboursement par les Duras des dépenses militaires engagées. Pour la ville de Nice, la charte de 1388 est un acte constitutif d’importance majeure qui lui garantit la jouissance d’une grande liberté municipale et lui donne le statut d’une dédition volontaire.
A l’exception de deux périodes françaises sous Louis XIV et durant la révolution suivie du 1er Empire, La maison de Savoie va régner pendant près de 500 ans sur le Comté de Nice et va laisser son empreinte dans nos archives se distinguant ainsi des autres provinces françaises dans la tenue de l’état civil.
L’obituaire de l’ancienne cathédrale Sainte-Marie de l’Assomption, qui date du XVe siècle, est un des premiers registres connus. Même incomplet et ne mentionnant pas les années des décès recensés, ce document reste une base d’étude anthroponymique et une source d’information pour les historiens.
L’ordonnance de Villers-Cotterêts en 1539, impose le Français pour les actes officiels. Par l’édit de Rivoli, le 22 septembre 1561, le Duc Emmanuel-Philibert statue à son tour et décide de l’emploi d’une langue officielle l’ « italien », à l’exception de la Savoie qui remplaça le latin par le français.
Dans le Comté, l’ « italien » avec ses variantes restera la langue officielle jusqu’en 1860, en dehors des périodes d’invasion française (1691 à 1713 et de 1792 à 1814).
Après le concile de Trente, pour la première fois, des registres de baptêmes et de mariages sont mis en place par la Bulle « Sucut ad sacrorum concilio-rum » du pape Pie IV.
Ces mesures ne seront pas adoptées dans le royaume de France, à la suite du refus du Parlement de Paris.
À Nice, dès le 16 avril 1564, le curé de Sainte-Réparate anticipe l’application prévue pour mai 1565. Il faudra attendre mai 1588 pour les sépultures. Le premier acte écrit dans un amalgame de latin, de français et de patois, fait mention du baptême de l’enfant de Claude Rainart et de ses parrain / marraine, mais son prénom n’est nullement indiqué !
Au début du XVIIe, la plupart des paroisses disposent de la triple série des registres.
Le duc Charles-Emmanuel 1er va renforcer les dispositions du concile, par l’édit de 1582, qui va en fixer les modalités et va instituer la tenue d’un registre unique pour les baptêmes, les mariages et décès en un seul exemplaire. Ces dispositions seront confirmées par le duc Victor-Amédée 1er en 1633.
À contrario, l’édit de 1582 offre peu de précisions sur la forme et la rédaction des registres, hormis les mentions obligatoires prévues dans le concile de Trente : la mention du parrain et de la marraine pour les baptêmes et les éventuelles dispenses pour les mariages. Les premiers enregistrements sont souvent très succincts et ne font pas mention de la filiation. La tenue des registres dépendait essentiellement de son rédacteur, qui avait une totale liberté sur sa mise en œuvre.
Malgré la tenue de registres unique et les risques y afférant, les disparitions sont peu nombreuses et le fonds des archives diocésaines dispose de séries très complètes. Malgré tout, certaines paroisses importantes ne disposent pas de registres antérieurs à 1600 : Lantosque, Villefranche-sur-Mer…
L’invasion du Comté de Nice par les troupes révolutionnaires, le 29 septembre 1792, eut pour effet la désorganisation de la structure religieuse de l’ancien Comté. Annexé par la France le 31 janvier 1793, en matière d’état civil, la législation savoyarde de 1582 cessa d’avoir cours et fut remplacée par la nouvelle législation française sur l’état civil.
Dans les communes, c’est le maire qui est promu Officier de l’état civil et doit tenir les registres de naissances, de mariages civils et de décès. Ils sont tenus en double exemplaire. Les anciens registres de catholicité sont remis à la mairie.
En parallèle, les curés encore en place tiennent des registres de baptêmes, des mariages canoniquement célébrés et des sépultures, mais avec parfois un manque de régularité, de précision et de rigueur. Dans certaines communes le culte et la tenue des registres furent interrompus, et les offices furent repris dans les petites chapelles environnantes, transformées en églises paroissiales en 1803. La mise en place des décrets des 20-25 septembre 1792 et des mesures concernant l’état civil a été source de tension entre les représentants de l’Etat et du clergé. En effet, le nouvel évêque de Nice, Mgr Jean-Baptiste Colonna d’Istria a dû à plusieurs reprises intervenir auprès des prêtres pour leur rappeler, à la demande du préfet ces nouvelles procédures.
En 1804, conscient des écarts entre les registres de catholicité et ceux de l’état civil, il décida d’uniformiser les formules des différents actes que les curés auraient à tenir et édita un mandement de 28 pages : « Formule (sic) des différents actes que MM. les curés, recteurs des succursales, vicaires et autres prêtres ont à dresser ». Ces formules seront celles qui figureront en français dans tous les registres de catholicité du Comté de Nice jusqu’en 1814, à la date de l’abdication de Fontainebleau qui mit fin au Premier Empire.
A la nouvelle de l’abdication de l’empereur (10 avril 1814) et du traité qui mit fin à la Campagne de France (11 avril 1814), les curés reprirent la main sur la tenue des actes de catholicité. Dès le 14 juin 1814, l’abbé Grimaldi, vicaire général du diocèse de Nice, leur ordonnait de reprendre les registres paroissiaux dans les mairies. C’est le temps de la restauration Sarde et le comté intègre dorénavant le royaume de Piémont-Sardaigne.
La législation française antérieure étant abrogée, les curés se remirent à dresser les actes de catholicité revêtus d’un caractère officiel et sur un registre unique. L’évêque de Nice adressa à tous les desservants des paroisses le modèle des formules en latin destinées à se substituer à celles en français (décret du 28 mars 1816).
Enfin, les desservants durent procéder tous les ans à une copie « authentique, nette, bien écrite et établie sur papier ministre des actes établis pendant l’année écoulée et l’adresser à la Chancellerie de l’Évêché pour vérification ». Ce sont ces copies qui ont été conservées et qui constituent le fonds des archives. Aux termes de la patente de juin 1837, le curé est seul responsable de l’état civil et une commune peut avoir plusieurs paroisses.
À la suite d’une demande du Saint-Siège d’uniformiser de façon définitive l’ensemble des formules des actes d’état civil dans le royaume de Sardaigne, le roi Charles-Albert fit rédiger la patente royale du 20 juin 1837.
Partant des dispositions et des instructions de la sacrée congrégation des affaires ecclésiastiques du 23 août 1836, cette patente va être le point de départ de la législation en matière d’état civil et sera reprise par le futur royaume d’Italie.
À la différence de la France où l’état civil officiel dépend d’une commune, dans le royaume de Sardaigne il dépend des paroisses et il peut y en avoir plusieurs dans la même commune (17 à Nice, 5 à Utelle, 4 à Lantosque …), ce qui complique les recherches et constitue le défaut majeur de ce système qui a pourtant évolué.
La mise en application a lieu à partir de 1838, les curés ont pu ainsi finir les anciens registres. Afin de faciliter leur tâche, ils reçurent de nouveaux registres avec les mentions pré-remplies. Le nouvel évêque de Nice, Mgr Dominique Galvano va insister sur l’importance de l’application de ce texte et recommande d’être précis dans la rédaction des actes, de veiller à la présentation et à la conservation des registres.
Le 12 juin 1860 création du nouveau département des Alpes-Maritimes, avec la réunification des deux rives du Var : arrondissement de Grasse et le Comté de Nice, en 1947 Tende et la Brigue viendront par référendum finaliser les contours de ce nouveau département français.
La législation française sera de nouveau appliquée dans le Comté après le rattachement, à partir du 31 décembre 1860 (qui fait suite au traité secret du 14 mars 1860, la France accepte l’unité italienne en échange de Nice et de la Savoie). À la différence de 1792, les registres paroissiaux, par omission du sénatus-consulte du 12 juin 1860, restent la propriété des fabriques et dans les paroisses.
À compter du 1er janvier 1861, les mairies tiennent les registres officiels (naissances, mariages et décès) et les paroisses de nouveaux registres des baptêmes, des mariages célébrés selon les rites sacramentels mis au point lors du Concile de Trente et des sépultures religieuses. Par décret du Pape l’arrondissement de Grasse est rattaché au Diocèse de Nice en 1886, ce qui met fin au particularisme du Comté de Nice ».
Bibliographie :
- BODARD Pierre : L’état civil ancien dans le Comté de Nice Recherches Régionales n° 93 – Oct.-Déc. 1993
- BOURRIER Michel – COLLETTA Gérard : Chronologie illustrée de l’histoire du Comté de Nice – SERRE éditeur – 2000
- COMPAN André: Histoire de Nice et de son Comté – SERRE éditeur – 2002